Retour sur le panel «Investir dans le secteur SaaS» du 25 janvier 2022

février 2022

Le 25 janvier dernier, le comité Nouvelle génération a présenté un panel au sujet de l’investissement dans le secteur des SaaS (Software as a service).

Ce panel visait entre autres à définir les grandes tendances quant à l’évolution du modèle d’affaires et des canaux de distribution, à exposer les éléments de valorisation qui sont mal compris des investisseurs, à énoncer les défis des entreprises du secteur et à évoquer l’impact de l’entrée d’investisseurs non traditionnels au sein de ce dernier.

Depuis le début de la pandémie, à quoi ressemblent la croissance, le nombre et la qualité des opportunités d’investissement ainsi que la taille des rondes et des multiples de valorisation ?

Tous ces sujets ont été discutés avec nos panélistes et notre modérateur d’expérience : Mia Morisset, Vice-présidente d’iNovia Capital, Mathieu Provost, Premier directeur, Capital de risque et technologies de la Caisse de dépôt et placement du Québec, Samuel Nasso, Vice-président principal de Novacap et Nectarios Economakis, cofondateur et associé chez PNR.

 

Extrait du panel


On utilise généralement la règle du 40 % pour évaluer la valorisation d’une entreprise, ce qui signifie que la somme du taux de croissance et du bénéfice (BAIIA) devrait atteindre au minimum 40 %. Dans la dernière année, on a remarqué un certain abandon de la règle du 40 % pour une utilisation unique de la croissance comme métrique SaaS. Aujourd’hui, on aperçoit un retour du balancier. Selon les conférenciers, on devrait avoir un modèle plus équilibré, qui est viable et profitable sur le long terme.

D’après les membres du panel, les principales métriques essentielles pour évaluer une entreprise SaaS en capital de développement sont :

  • Les bénéfices;
  • La croissance potentielle des revenus (revenue growth);
  • La rentabilité;
  • La rétention nette;
  • Le maintien de la croissance;
  • La viabilité.

Un nouvel indice de référence semble également important selon nos intervenants, soit la rétention nette. Il fournit des informations plus approfondies que les revenus mensuels récurrents (RMR) et le coût d’acquisition du client (CAC). En effet, il calcule le pourcentage de revenus récurrents conservés des clients existants au fil du temps, en prenant en considération les annulations, rétrogradations et demandes de suspension.

À quelle rapidité la base de clients actuels croît-elle de manière indépendante ? Si l’on n’obtient aucun nouveau client, quel est le pourcentage annuel de croissance attendu pour l’entreprise ? Lorsque la réponse est 15 %, il s’agit d’une entreprise Premium; c’est le nouvel objectif.

Du côté VC, il appert que les investisseurs se sont rapidement adaptés au marché et au secteur. Trois aspects de l’investissement en SaaS permettent de tirer son épingle du jeu: la capacité de prospection, la vérification diligente et la monétisation à valeur ajoutée.

En effet, il n’existe plus de barrières géographiques donc nous observons davantage de compétition dans les transactions. Cela se traduit par l’arrivée d’investisseurs étrangers, mais également par la migration des investisseurs traditionnels et du capital de développement vers des transactions qui étaient typiquement davantage liées aux fonds en capital de risque. Pour se démarquer, il faut se spécialiser.

Pour ce qui est de la vérification diligente, il est nécessaire d’être proactif et de connaître l’entreprise avant-même la première rencontre afin d’entamer une discussion stratégique dès le début. Les processus sont plus courts et cela fait en sorte que les entreprises requièrent de la part des fonds une certaine expertise dans leur domaine. Par ailleurs, les investisseurs se doivent de planifier leurs cartes à peine quelques semaines après la clôture de la dernière série en vue de la prochaine. Pour les entreprises en démarrage, on remarque aujourd’hui que plus ou moins 50 % des rondes primaires ont une portion secondaire, comparativement à avant, où ce pourcentage était davantage autour de 10-15 %. Cela leur facilite l’accès à une porte de sortie.

Du côté de la monétisation à valeur ajoutée, nous avons observé une croissance soudaine des introductions en bourse (IPO) en 2021. On retrouve même des rondes secondaires pour les entreprises Premium, lequel est un fait tout à fait inédit. Une chose est claire : l’environnement ne cesse de se transformer et c’est pour cette raison qu’il faut se concentrer sur la base (core). Il faut revenir aux éléments fondamentaux, aux métriques clés.

D’autre part, il faut aussi être patient, prudent et sélectif dans le choix de l’entreprise que nous voulons soutenir. Concorde-t-il avec nos critères ? Nous devons être plus intelligents et disciplinés dans la façon de gérer le pipeline. Il y a toujours des fonds qui vont payer plus cher dans le marché, il est donc indispensable de créer une synergie avec l’entrepreneur afin de se distinguer.

Un autre nouveau phénomène aperçu dans le marché est le « grow into valuation ». Les gens paient pour la valeur future de l’entreprise. Ceci met une pression énorme sur les entrepreneurs et leur marge d’erreur en est extrêmement limitée.

Depuis le début de la pandémie, les actifs qui apportent une certaine tranquillité d’esprit ont la cote. Le secteur Saas, que l’on considère comme fiable, ne fait pas exception. On y observe donc un accroissement de la compétition dans les derniers mois. Les investisseurs sont prêts à payer pour des valorisations plus élevées, car il s’agit d’actifs sûrs et conservateurs !

Les banques n’ont pas tardé à revoir leurs stratégies en termes d’investissement et sont maintenant beaucoup mieux adaptées au marché. Elles utilisent une approche différente et essaient de mieux comprendre le modèle d’affaires des entrepreneurs. Ces nouveaux joueurs sont un bel atout pour l’écosystème actuel et viennent en quelque sorte l’équilibrer.

Cela va sans dire que les fonds détiennent tout de même un avantage concurrentiel puisqu’ils apportent beaucoup plus que du capital. Ils offrent une valeur ajoutée avec leur accompagnement personnalisé et leur expertise dans le domaine. En ce sens, la dette ne remplace pas l’équité dont ils ont besoin, mais vient plutôt supporter le plan de croissance des fonds.

 

Quelles sont les prédictions pour 2022 ?

La plupart s’attendront à une régression des valorisations. Certes, l’écart entre les bons et les très bons actifs se corrigera, sauf en ce qui concerne les entreprises les plus convoitées. Les investisseurs devront plus que jamais demeurer à l’affût des opportunités et devront rapidement engager l’action, le cas échéant. Enfin, ils devront continuer de s’adapter tout en acceptant ces nouvelles variables qui ne sont pas près d’être délogées.