Article 5 : Portrait du capital de développement au Canada et au Québec

mars 2025

Un écosystème diversifié en évolution

Le secteur du capital de développement au Canada et au Québec est un levier important pour la croissance des entreprises et de leur productivité, contribuant non seulement à leur financement, mais également à l’amélioration de leur compétitivité sur les marchés nationaux et internationaux. Selon les données de CVCA, après une année 2023 marquée par des niveaux d’investissement historiquement bas, le marché du capital de développement a rebondit en 2024. La valeur totale des transactions de 2024 est la plus élevée depuis 2017[1]. Également, le nombre de transactions a progressé de plus de 147 % depuis 2013 [2].

Flux des transactions en capital de développement par année au Canada

 

Source : CVCA

Le capital de développement au Canada est influencé par les caractéristiques sectorielles qui varient d’une province à l’autre. Les priorités économiques locales dictent les secteurs dominants, contribuant à structurer un marché national adapté aux besoins spécifiques des différentes provinces. Ces dynamiques sont mises en lumière par les données du rapport trimestriel T4 2024 de CVCA, qui illustrent les tendances et les performances sectorielles régionales.

Selon ce rapport, en Ontario, les technologies de l’information et des communications (ICT) dominent largement en 2024 avec un total de 52 transactions. À l’échelle nationale, ces priorités sectorielles se reflètent dans d’autres régions, où les spécificités locales influencent la répartition des investissements. La Colombie-Britannique, par exemple, poursuit sur sa lancée des dernières années dans le domaine des sciences de la vie, avec 25 transactions enregistrées au cours de l’année 2024. De son côté, le Québec est mené par les investissements dans le secteur industriel et manufacturier, comptabilisant 131 transactions, un sommet tout secteur confondu au pays[3].

Selon les données de CVCA, bien que l’on retrouve des firmes de capital de développement d’un océan à l’autre, la grande majorité des transactions et des montants investis se retrouvent concentrés en Ontario et au Québec. Depuis 2013, le Québec a vu sa part augmenter significativement, atteignant 59 % des transactions et 69 % des montants investis en 2024. Cette avancée ne reflète pas seulement une augmentation du volume des transactions, mais aussi une stratégie institutionnelle visant à élargir l’impact du capital de développement sur des secteurs clés comme la fabrication, l’agroalimentaire et les énergies renouvelables[4]. Combiné avec l’Ontario, ces proportions atteignent respectivement 81 % et 89 % pour l’année 2024.

Proportion des transactions par province au Canada

Source : CVCA

La force du capital institutionnel

L’un des aspects distinctifs du capital de développement au Québec est le rôle des investisseurs institutionnels dans ce type de financement. Le Québec possède un nombre important d’investisseurs institutionnels tels que la CDPQ, BDC, Desjardins Capital, Investissement Québec, le Fonds de solidarité FTQ, et le Fondaction qui sont très actifs sur l’ensemble du territoire de la province. En effet, lorsque l’on examine les investisseurs les plus actifs au Canada, on constate que cinq des dix principaux investisseurs au Canada sont basés au Québec, incluant quatre des cinq premiers[5].

Les 10 investisseurs en capital de développement les plus actifs au Québec et au Canada en 2024

Source : CVCA

Le capital de développement: un moteur de croissance pour les régions

Le Québec occupe une place singulière dans l’écosystème canadien du capital de développement, en grande partie grâce à l’implication marquée de ses investisseurs institutionnels. Ces acteurs stratégiques, se démarquent par un engagement important envers le capital de croissance (growth equity). Cet apport important des investisseurs institutionnels en capital de croissance teinte le paysage du capital de développement du Québec. En effet, le portrait des trois provinces par type d’investissement en capital de développement montre que le Québec à la proportion la plus élevé d’investissement en capital de croissance avec 33 % comparativement à 22 % pour l’Ontario et la Colombie-Britannique.

Part des investissements en rachat et en croissance par province de 2013 à 2024

Note: Ces graphiques regroupent les investissements de type rachat et croissance exclusivement.

Source : PitchBook

L’influence des investissements institutionnels au Québec se manifeste également dans la répartition géographique des investissements en capital de développement. L’engagement des investisseurs institutionnels québécois à soutenir les régions se traduit par une proportion significative de transactions de capital de croissance réalisées en dehors des grands centres urbains. Lorsqu’on examine la répartition géographique des transactions en capital de développement dans les trois provinces, on remarque que le Québec à la plus basse proportion des investissements en capital de développement dans sa principale région urbaine (CMM). Cette répartition diffère de celle de l’Ontario et encore davantage la Colombie-Britannique, où le capital est généralement concentré dans les grands centres métropolitains.

Proportion des transactions provinciales réalisées dans les principales régions métropolitaines

Note : les placements privés dans des sociétés ouvertes (PPSO), ainsi que les premiers appels publics à l’épargne (PAPE), identifiés comme PPSO dans la colonne Deal Type 2 de PitchBook, sont exclus du graphique.

Source : PitchBook, Réseau Capital

Cet engagement régional des investisseurs institutionnels est bien reflété par l’approche d’Investissement Québec (IQ) en capital de développement. IQ a pour mission de stimuler l’innovation, l’entrepreneuriat et la croissance des investissements et des exportations dans toutes les régions administratives de la province. Pour y parvenir, des comités de développement régional ont été mis en place dans chacune des 17 régions. Composés de représentants locaux, ces comités repèrent et recommandent des initiatives favorisant l’essor économique régional[6].

Cette approche se reflète d’ailleurs dans les interventions financières d’Investissement Québec : au cours de l’exercice 2023-2024, plus de 55 % des projets financés par ses fonds propres provenaient de MRC non urbaines[7]. De son côté, le Fonds de solidarité FTQ a déployé 221M$ des 1,4G$ investis dans l’économie du Québec à travers ses Fonds régionaux de solidarité, et compte également 98 Fonds locaux répartis partout dans la province[8].

Ce soutien ciblé se manifeste aussi par la nature des transactions réalisées. Notre Rapport T4-2024 sur le capital d’investissement rapporte qu’en 2024, plus de 73 % des transactions de capital de développement au Québec concernaient des montants inférieurs à 25 millions de dollars canadiens, un pourcentage supérieur à la moyenne nationale de 61 %, mettant en évidence l’importance du capital de croissance pour les PME.

Proportion des transactions de croissance réalisées en dehors des principales régions métropolitaines, par province et année

Source : PitchBook, Réseau Capital

Le capital de développement joue ainsi un rôle important dans l’expansion des entreprises en régions, qu’il s’agisse d’accroître leurs capacités de production, de diversifier leurs activités ou de pénétrer de nouveaux marchés.



INFO CAPITAL

Info Capital rassemble l’ensemble des transactions et des actualités publiées dans nos infolettres hebdomadaires depuis janvier 2023. Popur en savoir plus, visitez notre la page.

Voici un aperçu des dernières actualités en capital de développement au Québec qui se retrouvent dans Info Capital.

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[1] Cette augmentation significative a été propulsée par la privatisation de Nuvei Corporation par Advent International, une transaction évaluée à environ 8,9 milliards CAD.

[2] Canadian Venture Capital and Private Equity Association. (s. d.). 2024 Q4 Canadian Private Equity Market Overview. CVCA. https://reports.cvca.ca/books/rzot/#p=10

[3] Ibid., https://reports.cvca.ca/books/rzot/#p=9

[4] Fondaction. (2024). Économies locales. https://www.fondaction.com/finance-durable/economies-locales/#:~:text=2%2C54%20G%24,cautionnements%20au%2031%20mai%202024.

[5] Bien que la Banque de développement du Canada (BDC) ait son siège social à Montréal, elle est une agence fédérale et non une institution financière exclusivement québécoise, contrairement aux autres investisseurs listés comme étant basés au Québec.

[6] Investissement Québec. (s.d.). Comités de développement régional. https://www.investquebec.com/quebec/fr/a-propos-de-nous/comites-de-developpement-regional.html

[7] Investissement Québec. (s.d.). Rapport annuel. https://rapportannuel.investquebec.com/

[8] Fonds de solidarité FTQ. (s.d.). Informations financières. https://www.fondsftq.com/fr-ca/a-propos/informations-financieres